Journal d’informations locales

Le 18e du mois

février 2015 / Goutte d’Or - Château Rouge

Quand les notes disparaissent au collège Clemenceau [Article complet]

par Adrien Vila

Depuis quelques années, les classes de 6e et 5e expérimentent un système d’évaluation sans notes auquel sont associés les élèves.

Le collège Georges Clemenceau vit depuis quelques années une impressionnante évolution : alors que son taux de réussite au brevet s’établissait à 53% en 2011, contre une moyenne nationale de 85%, il a atteint l’an dernier 71%. Le pourcentage d’élèves accédant à une seconde générale ou technologique s’est aussi sensiblement amélioré : de 38% en 2011, il s’élève aujourd’hui à 52%. Plusieurs facteurs sont en jeu (amélioration du climat scolaire, formation continue des personnels), mais l’élément majeur semble être le passage à l’évaluation par compétences et sans notes. Expérimenté pour la première fois à l’échelle d’une classe au cours de l’année scolaire 2010-2011, le livret par compétences s’est depuis généralisé à l’ensemble des 6e et 5e du collège.
Ce projet pédagogique, porté initialement par un petit groupe d’enseignants, s’appuie sur un constat : le manque de continuité entre le primaire et le collège, auquel s’ajoute la nécessité de s’adapter à un public en grande difficulté scolaire. «  Pour lutter contre le décrochage, nous sommes partis du principe que ce n’était plus aux élèves de s’adapter à leurs professeurs, mais aux professeurs de s’adapter aux élèves », confie le principal du collège, Pascal Delhom. Et donc de mettre l’évaluation au service de l’apprentissage, en redonnant aux élèves confiance en eux et plaisir d’apprendre.

du vert au rouge

Alors qu’un sondage IFOP publié en août 2014 indiquait que 74% des parents d’élèves se déclaraient défavorables à la suppression des notes à l’école, le dispositif mis en place au collège Clemenceau n’a pourtant pas soulevé de fortes oppositions. L’évolution progressive du projet sur plusieurs années y a sans doute contribué, en permettant à une partie des enseignants d’être formés par le rectorat à ce changement.
Par ailleurs, si le livret par compétences rompt avec la notation chiffrée, il ne supprime pas pour autant l’évaluation. Dans chaque matière, les élèves de 6e et 5e ont toujours régulièrement des contrôles à passer, au cours desquels ils sont évalués, non plus sur 20, mais à travers une grille de compétences déterminées au préalable par les enseignants. Quatre niveaux de maîtrise des connaissances sont alors distingués, auxquels sont associés quatre codes-couleurs : réussite totale (vert), réussite partielle (vert clair), à renforcer (orange) et non acquis (rouge). Selon M. Delhom, «  les objectifs de l’évaluation sont ainsi clarifiés et les élèves investissent mieux leur scolarité, car ils sont plus facilement mis en confiance ».

Un meilleur climat scolaire

Au collège Clemenceau, ce dispositif s’inscrit dans le cadre d’une réflexion globale sur la vie scolaire et les relations profs-élèves. Il s’accompagne d’autres pratiques innovantes, à commencer par l’existence d’un « journal de bord » à l’intérieur duquel chaque élève, suivi par un professeur, auto-évalue ses apprentissages dans le, but de mieux cerner ses difficultés. Des séances de lecture commune, dites de « médiation culturelle », sont également organisées à chaque première heure de cours dans les classes de 6e afin de stimuler les élèves. De gros progrès en termes de climat scolaire ont ainsi été constatés : le nombre de conseils de discipline a ainsi été ramené à deux pour l’année scolaire 2013-2014, contre plus d’une vingtaine dans d’autres établissements parisiens pourtant moins défavorisés socialement.
Le collège fait également partie d’un réseau de réflexion pour élaborer des axes d’éducation prioritaires, avec quatre écoles élémentaires (Cavé, Oran, Richomme, Goutte d’Or) et quatre écoles maternelles de l’arrondissement. Car si l’évaluation par compétences s’est bien développée dans les écoles, Clemenceau est le collège le plus avancé dans cette approche dans le 18e. Nous reviendrons sur l’expérience d’autres d’établissements dans un prochain numéro.


Illustration : © Hervé Baudry


Vous avez aimé cet article ? Soutenez Le 18e du mois en l’achetant en kiosque (2,30 € le numéro) ou en vous abonnant (à partir de 24 € pour 11 numéros par an).

Dans le même numéro (février 2015)

  • Le dossier du mois

    Barbès mise sur la qualité commerciale et culturelle

    Michel Cyprien
    L’ouverture de la brasserie Barbès, annoncée pour février, marque un temps fort des gros projets de rénovation de ce quartier. Des dizaines d’immeubles neufs ont remplacé des habitations insalubres à la Goutte d’Or et à Château Rouge. Plusieurs enseignes célèbres ont diversifié l’offre commerciale et culturelle avec, en particulier, l’ouverture du cinéma Le Louxor et l’installation de la librairie Gibert Joseph sur l’emplacement de l’ancien Virgin.
  • Goutte d’Or - Château Rouge

    Éduquer son enfant quand on est né ailleurs

    Nadia Djabali
    Le groupe de parole parents des Enfants de la Goutte d’Or fête ses 15 ans avec un film qui raconte leurs rencontres. Cela fait quinze ans que ça (...)
  • La vie du 18e

    Nouveau forfait pour la cantine scolaire

    Gilles Jeudy
    L’harmonisation des pratiques d’inscription des enfants à la cantine scolaire et de tarification des repas entre dans sa troisième phase. Notre (...)
  • La vie du 18e

    La tristesse et la colère

    L’équipe du 18e du mois
    Trois semaines après les attentats meurtriers des 7, 8 et 9 janvier, la tristesse et la colère continuent de bouleverser l’équipe du 18e du mois. (...)
  • La vie du 18e

    Quand Fox News compare le 18e à Bagdad

    Nadia Djabali
    La télé ultra conservatrice américaine a diffusé une description délirante de certains quartiers de l’arrondissement. Les rues de la Goutte d’Or, de (...)
  • La vie du 18e

    La grève continue dans les piscines, les stades et les gymnases

    Florianne Finet
    Le dialogue de sourds continue ! » Voici comment les syndicats résument la situation, un an après le début de la grève dominicale des agents (...)
  • La Chapelle

    Une chorale du 18e à la Philharmonie

    Stéphane Bardinet
    La Voix est libre va chanter dans un opéra autour de La Flûte enchantée de Mozart avec l’Orchestre de chambre de Paris. Pour La voix est libre, (...)
  • La Chapelle

    Un immeuble au pied vert rue Jean Cottin

    L’équipe du 18e du mois
    La végétalisation des rues du 18e se poursuit tranquillement. En janvier, c’était au tour de la rue Jean Cottin à La Chapelle. L’association Les Gens (...)
  • Grandes Carrières

    Apprendre l’art du vitrail

    Gilles Jeudy
    Une jeune vitrailliste vient de s’installer dans le 18e et propose des cours et des stages. Le quartier des Grandes Carrières revit depuis (...)
  • Porte Montmartre

    La Maison Bleue, un centre social géré par les habitants

    Marie Berthomé
    Ce nouveau centre social de la porte Montmartre invite les habitants du quartier à participer à l’animation. Une maisonnette bleue en carton sur (...)
  • Montmartre

    Les chevaux miniatures du Moulin Rouge

    Danielle Fournier
    Depuis le 6 octobre dernier, le Moulin Rouge fête ses 125 ans. Alors, nous sommes allés au cabaret ! 20h30. Tous les soirs, toute l’année, le (...)
  • Culture

    Un théâtre dans mon salon

    Marie Berthomé
    La petite troupe de théâtre ambulante de la compagnie Les Cris de l’Horizon monte et démonte le décor d’une pièce touchante et intime dans votre salon. (...)
  • Culture

    Saint-Valentin lyrique sur la Butte

    Annie Katz
    De la place des Abbesses au Musée de Montmartre, en passant par d’autres lieux mythiques, la soprano lyrique Veronica Antonelli propose de lier (...)
  • Théâtre

    Coup de cœur : les conférences gesticulées de Franck Lepage au Grand Parquet

    Catherine Soubelet
    du 24 février au 1er mars, Inculture 1 le mardi et mercredi à 19 h (une partie chaque soir), Inculture 2 le jeudi et vendredi à 19 h (une partie (...)

n° 230

octobre 2024