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janvier 2024 / La vie du 18è

Loi immigration : nos quartiers vont encore trinquer

par Maxime Renaudet

Prestations sociales, titres de séjour, droit du sol, quotas migratoires… la nouvelle loi immigration va encore durcir l’accueil des étrangers. Dans le 18e, la lutte a commencé.

Comme nous l’évoquions dans nos colonnes le mois dernier, le lycée professionnel Suzanne Valadon a été réquisitionné grâce au collectif Une école un toit, qui a entraîné avec lui des directeurs d’établissements, des parents d’élèves, des habitants et des élus du 18e. Transformé en lieu d’hébergement d’urgence avec l’aide d’Emmaüs Solidarité, le lycée a commencé à accueillir vingt familles, le vendredi 22 décembre, trois jours après le vote de la loi immigration remaniée en commission mixte paritaire – une victoire pour l’extrême-droite et le gouvernement, puisque cette loi risque de propulser la « préférence nationale » dans le droit français.

Une loi anticonstitutionnelle ?

En effet, cette loi durcit d’une manière draconienne l’accueil des populations étrangères, au point que certaines de ses mesures pourraient être retoquées par le Conseil constitutionnel.

C’est le cas, par exemple, de celle visant à entériner la fin du droit du sol. Jusqu’à présent, les personnes nées sur le territoire français de parents étrangers obtenaient d’emblée la nationalité à leur majorité ; maintenant, comme l’avait souhaité Nicolas Sarkozy en 2011, il faudra qu’ils en manifestent la volonté entre leurs 16 et 18 ans (et qu’ils n’aient pas été condamnés pour crime). Le texte voté restreint également l’obtention de l’allocation personnalisée au logement ; les étrangers sans emploi devront attendre cinq ans pour prétendre pouvoir le toucher (pour ceux qui travaillent, ce délai est raccourci à trois mois).

Concernant la régularisation dans les métiers en tension, c’est-à-dire ceux où les employeurs peinent à recruter, les titres de séjour seront délivrés à la discrétion des préfets, pour une durée d’un an et à condition d’avoir travaillé douze mois (consécutifs ou non) au cours des vingt-quatre derniers mois, résidé en France depuis trois ans et ne pas avoir été condamné. Enfin, alors que le regroupement familial est également durci par ce texte, que certains étudiants étrangers devront s’astreindre à verser une caution pour étudier et que les obligations de quitter le territoire français seront plus nombreuses, des quotas migratoires seront votés par le Parlement.

Réquisition et déambulation

En réponse à cette loi portée par Gérald Darmanin, la fronde ne s’est pas fait attendre. Alors que 32 présidents de départements de gauche ont annoncé qu’ils n’appliqueraient pas certaines dispositions prévues et que les députés de gauche ont saisi le Conseil constitutionnel, la Ville de Paris refuse elle aussi de « faire le tri », a annoncé Anne Hidalgo lors de sa visite au lycée Suzanne Valadon, le jour de sa transformation en lieu d’hébergement d’urgence où 120 personnes seront accueillies.

Accompagnée, entre autres, d’Eric Lejoindre et de Ian Brossat, la maire (PS) de la capitale a fait le déplacement pour visiter les lieux, rencontrer les familles et organiser un point presse au cours duquel elle a montré sa farouche opposition à la loi immigration. C’est également contre l’adoption de cette loi qu’un millier de personnes ont manifesté à Paris le vendredi 22 décembre. Neuf jours plus tôt, une déambulation antiraciste était organisée de Barbès à Jules Joffrin, avant une rencontre antiraciste le 15 décembre à l’union locale de la CGT située au 18 de la rue de Clignancourt. Des actions amenées à se répéter courant janvier, période à laquelle le Conseil constitutionnel devra rendre sa décision quant à la recevabilité de cette loi immigration.

Photo : Maxime Renaudet

Dans le même numéro (janvier 2024)