février 2014 / La vie du 18e
Marie-Pierre Larrivé, rédactrice en chef du 18e du mois, s’en est allée
Marie-Pierre Larrivé, est décédée d’un cancer le lundi 6 janvier 2014. Depuis des années, elle ne comptait pas ses heures pour raconter la vie de cet arrondissement parisien et pour promouvoir, y compris sur les marchés, notre journal créé en 1994. Toute l’équipe du 18e du mois, de nombreux habitants, élus et responsables associatifs sont dans la peine.
Marie-Pierre en hiver
Il y a quelques décennies et pas mal d’hivers, Marie-Pierre et moi étions conviées à déjeuner par la « bande à Spirou », journalistes et dessinateurs belges de la célèbre BD, de passage à Paris. Journaliste à l’éducation à l’AFP, elle était « Madame BD » de l’agence. Elle y avait créé la rubrique et était réputée pour ses tenues bohèmes, son franc-parler et son fichu caractère.
Il neigeait abondamment sur la capitale ce jour-là. Nous attendions en plaisantant au restaurant l’amie Marie-Pierre qui se faisait longuement désirer. Quand d’un coup, la porte s’ouvrit grand comme sous la poussée d’un géant, livrant au passage un lot de flocons couvrant Marie-Pierre, énergique et souriante, en robe légère et peau de mouton de bergère. Et chacun de découvrir sur son passage ses pieds nus glissés dans des tongs, exhibant ses ongles longs et peints, comme à son habitude, de couleurs assassines, lie-de-vin, noir, violet, bien avant « les Gothiques ». Reine de la provoc’ elle était, reine de la provoc’elle demeure. Et on ne saurait l’imaginer autre.
Jacqueline Gamblin
L’amour, toujours l’amour
« Peace and Love. MPL » voilà comment Marie-Pierre avait pris l’habitude de terminer ses mails pour nous rappeler à l’ordre, soit sur le calendrier des réunions, soit sur un retard d’envoi d’articles, soit pour diffuser les derniers potins de l’arrondissement… Paix, oui paix. Marie-Pierre avait une sainte horreur des guerres, conflits, déflagrations qui embrasent notre planète à chaque coin du globe. Amour, oui amour du travail bien fait, Marie-Pierre, amoureuse de belles lettres, d’une grande culture littéraire, ne laissait rien au hasard au cours de ses rédactions et de la construction de votre journal. Cette petite Dame nous manque et aujourd’hui tout est dépeuplé.
Michel Cyprien
Rigueur et obstination
Marie-Pierre, c’était un petit bout de femme pleine de vie, de rigueur et d’obstination. Elle venait régulièrement assister aux Conseils d’arrondissement, même les plus longs et les plus ennuyeux, s’intéressant à tout. Elle savait vous rappeler pour avoir des précisions sur tel ou tel sujet et il valait mieux lui répondre de façon claire… Avec Noël Monier, ils ont formé un couple bien soudé autour de cette idée que les Parisiens ont envie d’une information non engagée sur les problèmes quotidiens qu’ils rencontrent dans leur arrondissement, dans leur quartier… et ont su mobiliser les volontaires pour que le 18e du Mois – un des rares journaux d’information d’arrondissement à Paris – puisse vivre si longtemps. Salut Marie-Pierre et toutes mes amitiés à Noël !
Michel Neyreneuf
L’amour pour la Corse
Marie-Pierre était une grande journaliste. Elle était aussi, peu le savent, une artiste inventive et d’un humour pétillant. Elle a magnifiquement croqué les villages perchés de Balagne. Ses dessins disent l’amour qu’elle avait pour la Corse, ardente et secrète, rebelle et passionnée. Ses collages aussi sont de purs moments de poésie. Avec quelques journaux, quelques images, quelques mots, dans la tradition des surréalistes et des dadaïstes, elle nous transportait dans un univers parfois grinçant, mais toujours au cœur de l’humain. Elle nous mettait en joie. Adios, Adeu, Marie-Pierre ; je garde précieusement tes dessins.
Dominique Delpirou
La curiosité en héritage
Un jour d’octobre 2013, dans le local du journal. Je viens rencontrer Marie-Pierre juste après mon élection à la présidence du CA des « Amis du 18e du mois », ayant « quitté » l’équipe voici une dizaine d’années. Je la sais engagée dans une bataille contre la maladie. Si ce n’est ce foulard cachant les effets des chimios, elle n’a pas vraiment changé, toujours intarissable. Elle parle de Noël Monier, son compagnon disparu depuis peu, de leur passion pour le 18e, de leurs vacances sur leur terre d’adoption, la Corse. Et me raconte une anecdote que j’ignorais. Découvrant un festival de théâtre, voici 15 ans, dans un petit village de l’arrière-pays, elle s’était mise à écrire une dépêche qu’elle avait transmise à l’AFP. Précisons qu’elle était en vacances. « J’ai besoin d’écrire tout le temps », me confia-t-elle, parlant de sa seconde drogue après (ou avant) la cigarette. Elle était comme ça, insatiable en rencontres, en découvertes, sur l’île de Beauté comme dans le plus bel arrondissement. Quand je lui posai la question sur sa santé, elle eut cette réponse étonnante, mélange de mauvaise foi et d’extrême pudeur. « Mais je vais très bien, Noël ! ». Tchao Marie-Pierre ! Nous allons soigneusement cultiver cette vertu que tu nous as léguée : la curiosité.
Noël Bouttier
Une amoureuse du 18e
Elle a toujours eu à mon égard beaucoup d’encouragements et puis on a lutté contre une maladie commune (le cancer), ça a créé beaucoup de lien. J’avais beaucoup de respect pour elle et c’était réciproque. C’est une vraie amoureuse du 18e. Et quelle belle aventure, ce journal !
Roxane Decorte
Photo : © Christian Adnin