Ils se relaient jour et nuit au centre de secours Montmartre, au service des habitants du 18e.
7h30 : Au centre de secours Montmartre, plus connu dans le quartier sous le nom de « caserne Carpeaux », les journées commencent tôt. Ou plus exactement elles s’enchaînent sans interruption au rythme des gardes de vingt-quatre heures assurées par les pompiers. Quelque 190 hommes et quatre femmes de la 9e compagnie d’incendie et de secours (CIS) de la Brigade de sapeurs pompiers de Paris se relaient sans interruption tout au long de l’année pour être toujours prêts à porter secours aux habitants du 18e arrondissement, d’une partie du 17e et de Saint-Ouen
Une organisation millimétrée
Chacun assure ainsi cent vingt gardes de vingt-quatre heures par an plus vingt journées de service. Et beaucoup viennent de loin : la majorité des pompiers de Paris sont et restent des provinciaux qui, entre deux gardes, retournent dans leur région où ils continuent souvent d’intervenir comme pompiers volontaires, soutenant les bénévoles grâce à leur savoir-faire de professionnel. À Paris, tous sont des militaires depuis la création par Napoléon, en 1811, du bataillon de sapeur-pompiers de Paris, devenu Brigade en 1967.
Dès 7 h 45, au cours d’un premier rassemblement, le chef de garde du jour donne ses instructions, indique à chacun son poste. Suit un rituel quotidien au cours duquel chaque pompier serre la main à tous les autres membres de la garde. Tous les lundis matin a ensuite lieu un second rassemblement, plus solennel, en tenue de feu, casque étincelant sur la tête : c’est la cérémonie des morts au feu. L’ambiance est grave. Le drapeau est levé. On chante l’hymne national, puis le nom de chaque mort est salué. Suit une minute de silence.
Trente interventions par jour
Aussitôt après, tous se mettent au travail : il faut vérifier le bon fonctionnement du matériel. La caserne dispose de trois véhicules incendie : l’un équipé d’une grande échelle de 24 m fixée sur le véhicule, et deux autres munis d’une échelle amovible de 5 à 15 m. Les joints et les systèmes de fixation des immenses tuyaux (200 et 400 m) sont vérifiés un à un ainsi que l’ensemble des équipements des quatre VSAV (véhicules de secours aux victimes). Chaque geste doit être répété chaque jour pour permettre d’être le plus rapide et le plus efficace possible sur le terrain.
Le seul centre de secours Montmartre effectue environ 11 000 interventions par an, soit plus de 30 par jour. Celles-ci concernent à 85 % des secours aux victimes et moins de 5 % des incendies. En une demi-heure ce matin-là, trois véhicules de secours ont déjà « décalé » selon l’expression en vigueur. Suite à la répartition des tâches du matin, chaque homme sait, d’après le type de sonnerie (un long, ou un long et plusieurs courts), vers quelle voiture se diriger et pour quel type d’action. « Si c’est un feu, on décale tous » souligne le capitaine Olivier Clerbout qui commande la 9e compagnie.
Un entraînement quotidien
Entre deux interventions, tous s’entraînent quotidiennement. Et d’abord au fameux test de la planche placée à l’entrée du gymnase à 2,40 m du sol. Il faut d’un bond s’y agripper puis, par une traction, se hisser pour poser les bras dessus. Dans la grande cour, une tour ouverte en forme de cage d’escalier sert aussi aux entraînements. Le groupe part ensuite courir sur les pentes de la Butte. Le métier exige une excellente forme physique. D’ailleurs les militaires du rang sont très jeunes : 24 ans en moyenne. En s’engageant, chacun a signé un contrat pour cinq ou six ans. Contrat renouvelable, et souvent renouvelé dans la limite de 25 ans d’activité, ou jusqu’à l’âge de 59 ans pour les officiers.
Pour tous, la caserne est non seulement un lieu de travail, mais aussi, en raison de la longueur des gardes, un lieu de vie. Dans les étages, ils disposent d’une salle à manger où le service s’adapte aux contraintes horaires des pompiers. Et aussi de salles de détentes, coin télé et, tout en haut, de chambres de garde pour prendre un peu de repos la nuit entre deux interventions. Car ici on ne dort jamais que d’un œil : quand retentit la sirène, il faut enfiler veste et bottes et rallier son véhicule en se laissant glisser d’étage en étage le long des perches. Sur la façade moderne dans la cour, à côté de Honneur et Patrie, on lit aussi Discipline et Dévouement.
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Photo : © Joseph Banderet