Au-delà des deux mois de confinement, l’inconnue d’une éventuelle réouverture est une épée de Damoclès pour une structure déjà si fragile.
« On est sur le qui-vive, ici c’est l’improvisation permanente, expliquent les deux propriétaires du théâtre, Husny Hasan et Sylvain Mély. Le théâtre Pixel (38 places), situé dans le quartier Simplon, occupe une place singulière dans le paysage du 18e. Il a été repris voici cinq ans par ces deux fondus de théâtre qui ne sont pas des professionnels. L’un est informaticien, l’autre a longtemps travaillé pour un huissier. En reprenant ce lieu qui existait déjà depuis une dizaine d’années (c’était un garage Harley Davidson), ils ont voulu faire vivre une vision de la culture : »J’aime participer à la vie culturelle, explique Husny. Nous avons choisi d’ouvrir le théâtre à de nouveaux genres, comme le tango, la musique classique, notamment."
Aujourd’hui, cette diversité se remarque par la multiplicité des spectacles dans la semaine, plus d’une dizaine, la présence de séances pour les enfants y compris les tout-petits, sans oublier des cours pour enfants et adultes.
« On sera bientôt à sec »
Le Covid-19 a tout bousculé. De septembre à décembre 2019, la fréquentation mensuelle du Pixel était passée de 500 à 800 spectateurs. Les longues semaines de grève des transports suivies très vite par les deux mois de confinement ont anéanti tous les efforts. Heureusement que la masse salariale est très faible : simplement les profs de théâtre. Mais comment faire face au loyer à payer et aux diverses charges ? Les gérants restent confiants : « On compte contracter un prêt de 5 000 à 6 000 euros garanti à 90 % par l’État. Mais cela nous oblige à prendre un expert-comptable, ce qui, pour une petite association comme la nôtre, n’était pas obligatoire », ajoutent Husny et Sylvain. Prudents, les deux gérants avaient constitué des réserves, mais « on sera bientôt à sec ».
Inventifs, ils ont commencé à mettre le théâtre à disposition de troupes qui veulent répéter, manière de générer quelques rentrées d’argent.
Pas simple d’ouvrir avec 20 places
Le seul sujet qui les fait sortir de leurs gonds, c’est le ministère de la Culture. Sur leur site, il n’y a aucune information concernant les structures comme la nôtre. Leur devise, c’est : “Démerdez-vous !”" Pour la rentrée, Sylvain et Husny, aidés bénévolement par Gérard Lipperte, réfléchissent à une réorganisation de l’espace. Une place sur deux pour respecter les distances, cela aboutirait à une vingtaine de tickets vendus. Autant dire que les compagnies, qui versent au théâtre un minimum garanti de 160 € par représentation, auraient du mal à s’y retrouver. De toute façon, la première difficulté va être de faire revenir les spectateurs dans un lieu aussi confiné. Sacré casse-tête ! En attendant, le trio du Pixel s’accroche à l’idée d’une reprise. Le premier spectacle programmé, c’est Dom Juan, le 12 septembre. Brûlons des cierges...
Photo : Jean-Claude N’Diaye