La Maison des coursiers a été inaugurée le 26 novembre. Elle offre, en plus d’un lieu de repos, une aide administrative et juridique à ces forçats du bitume parisien, via des permanences avec des associations spécialisées et des syndicats.
Un samedi après-midi pluvieux, Siaka et Siriki, deux livreurs à vélo, ont branché leurs téléphones sur les prises de recharge et discutent à voix basse. Tous deux sont des habitués de la Maison des coursiers et se déclarent « très contents de venir ici ». Ils apprécient de « s’asseoir un peu », quand la plupart de leurs collègues, qui ne connaissent pas encore le lieu, « s’assoient dans la rue » ou sur les Vélib’. C’est que dans cette activité, on « passe beaucoup de temps à attendre ». Selon un système de chiffres, correspondant à trois niveaux, ils ont droit à des créneaux pendant lesquels travailler, et le téléphone portable autant que le vélo sont des instruments de travail. Ils viennent aussi pour « essayer de s’intégrer », en tout cas, « améliorer leur situation administrative ».
C’est ce que confirme Circé qui travaille pour CoopCycle et anime le lieu. CoopCycle est une plateforme coopérative, créée en 2017, de livreurs et livreuses à vélo qui propose un logiciel de mise en rapport entre clients, commerçants et livreurs. L’idée est de développer, en France et ailleurs, la démocratie au travail ainsi qu’un statut salarial permettant une meilleure couverture sociale en développant cette fédération de coopératives.
Des horaires bientôt étendus
Depuis septembre 2021, grâce au soutien financier de la Mairie de Paris et de l’AMLI (pour Accompagnement, mieux-être et logement des isolés), CoopCycle reçoit les livreurs et livreuses des plateformes au 70 boulevard Barbès, dans l’ancien centre EDF. C’est peu, mais dès janvier, le lieu sera ouvert quatre jours par semaine. Très accueillant, joliment décoré par des artistes ou des enfants logés dans le centre d’hébergement d’urgence situé sur la cour, il est prêt à recevoir les coursiers.
Le projet, très ambitieux, ne se limite pas à offrir un café au chaud et l’accès aux toilettes et à une prise de téléphone. Le but est de « redonner les moyens de production aux travailleurs », de « mutualiser les ressources ».
Soutien administratif et social
Le champ d’action est vaste, dans un domaine où le social est souvent absent. Des permanences – administratives, économiques et syndicales – sont proposées aux coursiers et coursières dans les trois bureaux qui jouxtent la salle d’accueil. Ils y trouveront une aide pour déclarer leurs heures, et toutes les démarches administratives, y compris la régularisation des sans-papiers. SUD, la CGT, la CNT, Solidarité ouvrière et le CLAP (collectif des livreurs autonomes parisiens) seront présents. Le lien avec les entreprises d’insertion du 18e, comme Solicycle et Carton plein est déjà engagé et les coursiers qui le souhaitent pourront bénéficier d’un suivi personnalisé. Pour l’instant, « un diagnostic social rapide leur est proposé, précise Circé, qui permet de discuter, connaître leur situation et les orienter, en fonction de leurs besoins ». Une belle manière d’aider au quotidien et sur le long terme. Dehors, la pluie redouble et les commandes reprennent, plus nombreuses par mauvais temps !