Scientifique mais amoureuse de la langue française, la directrice du théâtre de la Reine blanche veut transmettre un patrimoine culturel.
C’est une femme élégante et chaleureuse qui vous accueille dans ce lieu de culture renommé du 18e arrondissement. Cet ancien garage est depuis 2005 le théâtre de la Reine Blanche. Ce lieu est lové entre la rue Marx Dormoy et les voies ferrées qui mènent à la gare du Nord, face à un hôtel de luxe et non loin de restaurants maghrébins et chinois. Ces paradoxes font le caractère du quartier. La propriétaire est elle aussi pleine de contrastes : jeune immigrée tunisienne, chercheur scientifique pleine de féminité, comédienne, auteure de théâtre et directrice de La Reine blanche.
Cette femme passionnée ne connaît pas la demi-mesure : « soit j’adore les choses, soit je ne les aime pas du tout, et ce que j’aime, je l’aime passionnément ».
Amoureuse du français
Elle a 3 ans quand ses parents, ses quatre frères et sœurs et elle-même quittent malgré eux la Tunisie. Le manque de travail et les tensions entre musulmans et juifs forcent cet exode. Élisabeth voit ce départ comme une aventure vers le pays de sa langue maternelle ; ses parents parlent l’arabe mais elle n’a appris que le français. Elle est amoureuse de cette langue, sa musicalité, le raffinement qu’elle y attache. Cette affection transparaît notamment dès l’âge de 10 ans quand elle se fait donner la réplique par sa sœur sur les textes de Corneille et Racine, avec pour scène le lit parental. Elle débute la scène en 5e, dans Les Fourberies de Scapin. Le virus la prend et ne la quittera plus.
En 1989, elle sort du conservatoire de Bourg-la-Reine avec le premier prix d’art dramatique en ayant interprété Minerve dans les Euménides. Cette reconnaissance est une fierté, celle d’avoir interprété la déesse de la guerre, de la sagesse, de la pensée élevée, des lettres, des arts et de l’industrie. Au sein du conservatoire, elle écrit et monte une nouvelle adaptation des Liaisons dangereuses de Laclos. Elle qui écrit depuis toujours, elle n’avait rien fini. « Et là, pour la première fois, j’avais écrit un pavé », raconte-t-elle. Suivront six pièces, dont deux montées en Avignon : À contre voix en 1994 et 2000, et L’Apatride, en 2013.
Son travail artistique, porté tout particulièrement par le personnage mythologique de Médée, analyse les sujets d’exclusion, du racisme ordinaire, de l’empathie. Un autre thème l’inspire, celui de la transmission : « C’est aussi une préoccupation de l’immigré. Je me suis mariée avec quelqu’un qui connaît ses origines en France jusqu’au XVIIe siècle ; il a une maison de famille en Bretagne, et moi, qu’est ce que je peux transmettre de moi ? »... (Lire la suite dans le numéro de novembre 2015)
Photo : © Christian Adnin
Dans le même numéro (novembre 2015)
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