Les Jardins d’Eole, dès leur ouverture, ont attiré de multiples activités de loisir. Si de nombreuses animations y sont organisées par la Mairie et les associations, différentes communautés ont su s’approprier les lieux et les équipements mis à disposition. Une mixité à l’image du nord-est parisien.
Depuis leur inauguration en 2007 grâce à la mobilisation d’habitants du quartier, d’associations et d’élus, les Jardins d’Eole ont parfois eu une existence mouvementée. Cette ancienne friche ferroviaire de quatre hectares, à la frontière du 19e arrondissement, est aménagée en plusieurs espaces : des jeux pour enfants, des terrains de basket et de football, un cani-parc, une ferme urbaine, des jardins partagés, un espace de sport en plein air.
Le lieu et ses riverains ont connu une période difficile, lorsque des toxicomanes usagers de crack l’avaient investi, rendant compliquée la cohabitation avec les autres utilisateurs du parc. Cette période étant désormais terminée, les riverains ont pu pleinement se réapproprier les lieux. Au cours de nos balades, nous avons discuté avec les usagers, échangé autour de leur utilisation de l’espace, des installations présentes dans le parc et de leur appréciation de l’ambiance générale.
Certains groupes ne parlant pas forcément le français, la communication a parfois été rendue compliquée. Mais nous avons souhaité partager ces rencontres aux Jardins d’Eole, parfois bien loin des clichés habituels.
Jardin partagé
Les membres du jardin partagé Le Trèfle d’Eole sont réunis en association depuis 2007, à la création des Jardins d’Éole. Environ soixante adhérents en font partie, habitant principalement les 10e, 18e et 19e arrondissements. Des parcelles collectives et individuelles occupent l’espace sur 400 m2. Chacun est libre de venir s’occuper de son carré de plantation quand il le souhaite, y planter ce qu’il veut. Le dernier dimanche de chaque mois, les adhérents se donnent rendez-vous pour entretenir les parcelles collectives et s’adonner ensemble aux travaux de jardinage. L’association essaie de nouer des liens avec les autres activités du parc et participe notamment à la Fête des jardins au mois de septembre. Avec la crise du Covid, les parcelles pédagogiques destinées aux écoles et aux centres de loisirs sont dans l’attente du retour de leurs jardiniers en herbe !
Bal du grand Parquet
Les Jardins d’Eole abritent également une scène qui dépend du théâtre Paris-Villette : Le Grand Parquet. Depuis 2012, cet établissement héberge des résidences d’artistes et propose les premières représentations de leurs travaux en devenir. L’espace est désormais strictement clos – au grand dam de ceux qui préféraient la conception initiale et largement ouverte du site – à la suite notamment de l’agression d’un salarié. Mais Le Grand Parquet continue d’accueillir les riverains, à l’image d’un bal populaire intergénérationnel, gratuit et organisé cette année le 19 septembre.
Tibétains
Chaque dimanche après-midi, des petits groupes investissent la partie sud des jardins, sous les arbres. Assis en cercle autour de jeux de société, d’un rami, ou devisant tout simplement, ce sont des ressortissants tibétains. Ils viennent de toute l’Ile-de-France : Noisy-Champs, Val d’Argenteuil, Saint-Ouen-l’Aumône... Kalsang, qui vit à Creil, et Nyma, qui habite Sartrouville (notre photo de couverture), se sont ainsi assises auprès d’une vendeuse de thé et autres beignets, surveillant du coin de l’œil leurs enfants sur l’aire de jeu. Tenzin, elle, vient de Saint-Denis et se charge de tenir quelques instants le stand de plats tibétains de son père pendant que d’autres jouent au sho, un jeu traditionnel.
Danseuses chinoises
Un groupe de danseuses chinoises s’entraîne sur les terrains de basket (ceux-là même qui ont été joliment rénovés à l’orée de l’été, grâce à l’association L’Etendart), tous les jours, de 9 h à 11 h . Ces dames sont une quinzaine, toutes âgées de plus de 50 ans. Elles habitent l’arrondissement et cet espace leur permet de se retrouver pour répéter leurs chorégraphies qu’elles présentent lors d’anniversaires ou de fêtes communautaires. Elles dansent pendant de longues minutes sur une même chanson, s’arrêtent puis regardent la vidéo de l’enregistrement, discutent entre elles et enfin se remettent à danser. Parfois elles changent de tenue, de musique et répètent les pas de danse d’une nouvelle chorégraphie.
Sportifs
De nombreux jeunes hommes viennent faire du sport sur les installations mises à disposition. Ils confient que les équipements sont de bonne qualité et que le fait d’habiter près du parc leur permet de venir régulièrement, d’autant plus que l’accès y est gratuit. C’est un lieu de rencontre pour les hommes qui viennent en groupe s’entraîner, un espace qui leur permet de se retrouver. Beaucoup viennent également seuls, écouteurs sur les oreilles, et bien que la barrière de la langue rende la discussion difficile, le sport est un moyen d’engager la conversation et de parler d’une passion commune. Même si l’espace est bien occupé par des habitués, le lieu reste accueillant pour les personnes qui viennent occasionnellement s’entraîner. N’y manque que… les sportives !
Photos : Jean-Claude N’Diaye et Thierry Nectoux