Des ateliers organisés par l’Echomusée ont permis à de jeunes migrants d’exprimer leur expérience.
Le projet de l’exposition qui a eu lieu à l’Echomusée du 24 janvier au 2 février était simple : rendre visible le quotidien difficile de ces jeunes migrants arrivés en France sans leurs parents, qui peinent à obtenir l’assistance qui leur est normalement garantie. Rencontre avec certains d’entre eux lors d’un atelier de linogravure avec l’artiste de rue Patrick Pinon.
« Je suis footballeur moi, pas artiste ! » lance Naby à la visiteuse qui vante ses talents en peinture. À 17 ans, il porte fièrement le maillot de l’équipe de foot de son pays d’origine, la Guinée Conakry. Il a fait de son drapeau sa palette : les lettres qu’il peint sont rouges, jaunes et vertes. Il est en train d’écrire « la vie nous enseigne beaucoup de choses » sur une feuille.
Récits de vie
L’atelier du jour résume à lui seul le projet de l’exposition : que des mineurs étrangers non-accompagnés puissent dire au monde ce qu’ils vivent.
Il y a plus d’un an, l’association Les Midis du Mie a commencé à organiser des ateliers entre ces jeunes et des artistes. C’était sans savoir que l’année qui viendrait serait « dramatique et triste, mais avec beaucoup de solidarité », selon les mots de la bénévole en charge de l’exposition. En 2023, plusieurs associations dont Les Midis du Mie ont encadré l’occupation de l’école Erlanger dans le 16e arrondissement par plus de 200 mineurs non-accompagnés pour réclamer une solution d’hébergement. Après être restés plusieurs semaines sans solution, ils ont organisé une action sur la place du Palais Royal. Les jeunes y ont installé leur tente pour la nuit. Ils ont été brutalement réprimés par les forces de l’ordre.
Dessins, photographies et captures d’écran de messages sont accrochés au mur pour se souvenir. Les messages évoquent le péril de leur vie : « Je sais que c’est compliqué et que nous sommes nombreux, mais il fait si froid et je me sens si malade ». Mais ils montrent surtout leur jeunesse : « quand vous aurez le temps est-ce que vous pouvez m’expliquer le complément d’objet indirect, si CDI doit avoir un accord dans une phrase ».
Cet après-midi aussi les jeunes veillent à la bonne orthographe des mots qu’ils ont choisi de peindre. Pas le droit à l’erreur : Moussa a refait entièrement son affiche parce qu’il avait oublié le « h » de « bonheur ». « Bonheur », c’est le mot qui lui est finalement venu au cours de l’atelier. Ce n’est pas un manque d’inspiration, c’est qu’ « il n’y a pas de mots dans ma tête, il n’y a que des soucis ». •
Photo : Pia Carron