Journal d’informations locales

Le 18e du mois

février 2024 / Le dossier du mois

Paris se dépeuple, notre arrondissement aussi

par Maxime Renaudet

La nouvelle cartographie des quartiers prioritaires de la ville (QPV) de Paris a été dévoilée par le ministère du Logement et de la Ville. Hormis dans les « faubourgs », celle du 18e n’a subi que de légères modifications.

C’est une première depuis 2014 et la création des QPV, appelés autrefois zones urbaines sensibles (ZUS), leur liste a été mise à jour en prévision du nouveau contrat de ville, lequel doit être mis en œuvre à compter du 1er avril 2024 pour six ans (voir encadré). Si de nombreux changements sont à noter en France et à Paris, notamment dans les 15e et 10e arrondissements, le 18e semble quelque peu épargné par ce redécoupage, lancé il y a plusieurs mois. Pourtant, sur le papier, ce n’était pas gagné, puisque les quartiers prioritaires des « faubourgs » auraient pu sortir de la cartographie. Il n’en est finalement rien : Porte Montmartre-Porte de Clignancourt-Moskova, Porte de La Chapelle - Charles Hermite, La Chapelle - Evangile, Blémont et la Goutte d’Or restent tous QPV. Néanmoins, ici et là, quelques ajouts et plusieurs suppressions ont eu lieu, comme les quartiers de veille active.

Chérie, j’ai rétréci la Goutte d’Or

Pour les QPV des portes du 18e, cette nouvelle cartographie n’a quasiment pas d’impact sur les frontières érigées en 2014. Avec une légère baisse de sa population (13 800 habitants contre 13 900 il y a dix ans), le quartier Porte Montmartre-Porte de Clignancourt-Moskova (carte n°1) s’étend quelque peu au sud-est — dont une petite partie de la rue des Amiraux et celle de Championnet — mais se rétrécit au sud-ouest et le long de la rue Fabre. Pour le quartier Porte de La Chapelle - Charles Hermite (carte n°2), qui concentre toujours plus ou moins 4 800 habitants, très peu de changements sont à prévoir, si ce n’est la suppression à l’ouest d’un petit bout du boulevard Ney et un miniscule ajout.

Les changements les plus importants ont lieu à la Goutte d’Or (carte n°3). Passant de 10 800 à 8 200 habitants, ce QPV se rétrécit au nord et épouse désormais une forme géométriquement indéfinissable. Dans le même temps, une micro-portion des rues Myrha et Cavé intègre le territoire, de même qu’au sud-est avec une partie des rue Pierre l’Ermite, Affre et Stephenson. Le quartier Blémont (carte n°4) ne bouge presque pas, hormis un léger rétrécissement au nord-ouest, au niveau de la rue Championnet et la rue Letort. Enfin, celui de La Chapelle-Evangile (carte n°5) se réduit à son tour, perdant notamment un rectangle formé par la rue Jean Cottin, la rue des Roses et celle des Fillettes, passant ainsi de 6 700 à 5 000 habitants.

Revenu médian, logement et QVA

Résultats du croisement des données de l’Insee et du travail de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), les modifications territoriales se fondent avant tout sur le critère unique de concentration de la pauvreté de la loi Lamy de 2014. Les QPV doivent compter au moins 1 000 habitants et respecter un seuil de revenu médian fixé pour Paris à 14 100 € (contre 12 800 € lors de la précédente révision en 2014). Cette hausse du revenu médian dans les différents territoires du 18e est le principal paramètre qui explique la refonte des QPV. À la Goutte d’Or par exemple, les données fiscales signalent toujours la présence d’une population à faible revenu : la part des ménages domiciliés dans le quartier déclarant un revenu inférieur au seuil de pauvreté tel que défini par l’INSEE atteint 39%, soit 14 points de plus que pour la moyenne du 18e arrondissement. Mais on constate aussi l’apparition d’une population plus aisée puisque la masse des revenus déclarés des 20% les plus riches est 16,8 fois plus élevée que celle des 20% les plus pauvres.

Outre ces inégalités de revenus, d’autres critères sous-jacents jouent un rôle dans cette nouvelle cartographie, comme le logement (lire notre article page 3), puisque le 18e se caractérise aussi par son mal-logement, des suroccupations fréquentes dans certaines zones et une proportion forte de logements sociaux.

En ce qui concerne les potentielles répercussions de cette nouvelle cartographie, dont une actualisation est prévue en 2027, la préfecture d’Ile-de-France et la préfecture de Paris assurent que l’impact sur les différents dispositifs départementaux sera faible, tout comme pour les subventions versées aux associations sur le budget politique de la Ville, car ce n’est pas l’adresse des associations qui importent mais le quartier de résidence des habitants.

Territoires vulnérables

Enfin, on notera malgré tout que les quartiers dits de veille active, initialement au nombre de cinq dans le 18e arrondisemeent (Goutte d’Or, Amiraux-Simplon, La Chapelle Sud, Bernard Dimey, La Chapelle Nord) ne sont plus reconnus par la loi, et donc supprimés de la géographie prioritaire. Mais en réalité, l’Etat intervenait que très peu dans ces quartiers, à l’exception de certains ayant des problèmes spécifiques. L’Etat pourra continuer à intervenir sur certains territoires, dits vulnérables, qui ne répondent pas aux critères de revenu médian ou de taille de population, mais ils ne sont pas encore définis précisément puisqu’un travail est encore en cours avec la Ville de Paris. •

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n° 331

novembre 2024