L’association « Retour vert le futur » organise régulièrement des ateliers gratuits de mécanique dans les quartiers populaires du 18e. Avec un objectif : démocratiser la pratique du vélo.
Un carré délimité par des rubans rouges et blancs, quelques boites à outil grandes ouvertes sur le trottoir et une sélection de pièces détachées. Bienvenue à l’atelier participatif vélo du quartier Charles Hermitte, entre les portes de La Chapelle et d’Aubervilliers. En ce vendredi après-midi, trois membres de l’association Retour vert le futur s’activent pour aider les habitants, petits comme grands, à réparer leurs deux-roues en bas de chez eux.
« Aujourd’hui, j’ai appris à mettre de l’huile dans les gaines de freins et sur ma chaîne et aussi à regonfler mon pneu, complètement à plat », énumère Dorsaf, une adolescente de 14 ans, ravie de pouvoir à nouveau enfourcher son VTT, un vélo qui dormait à la cave depuis plus d’un an, comme celui de son jeune frère. « On n’avait pas de quoi regonfler les pneus donc on avait mis les vélos de côté. C’est vraiment bien ces ateliers réparation juste à côté de la maison », souligne leur mère, Sonia. « Il n’y a pas beaucoup d’animations en général dans le quartier. »
Mohamed, lui, fait partie des cyclistes aguerris, avec ses 20 km quotidiens pour rejoindre son travail dans le 16e. Il profite ce jour-là de l’atelier pour démonter tranquillement sa chambre à air. « C’est plus pratique que dans les grandes enseignes où il faut prendre rendez-vous maintenant. »
Un service de proximité
En plus de la rue Charles Lauth, Retour vert le futur est présent le deuxième samedi de chaque mois de 11 h à 14 h, place Mac Orlan, entre Marx Dormoy et porte de la Chapelle. Même principe : permettre aux habitants de se remettre en selle, en les aidant à réparer leur vélo. Présents à la Bonne tambouille depuis 2017, nos joyeux réparateurs connaissent désormais un vif succès. Les passants apprécient ce service de proximité dans un quartier encore peu animé.
Celles et ceux qui souhaitent acheter un vélo ou qui ont besoin d’une réparation conséquente sont invités à se rendre au local de l’association, 156 rue d’Aubervilliers, à la limite du 19e arrondissement. Tous les samedis matin, les cyclistes peuvent apprendre à réparer eux-mêmes leur machine, accompagnés par la vingtaine de bénévoles qui composent le noyau dur de l’association. Des fiches techniques et des tutoriels sont également fournis, en plus du plateau technique. Une vraie caverne d’Ali Baba qui comprend des outils de professionnels comme une perceuse à colle, un compresseur ou encore une bibliothèque de pièces détachées. Dans la cave, on trouve tout un lot de chambres à air suspendues au plafond ainsi qu’une immense réserve de vélos. La plupart sont des épaves récupérées dans les caves des immeubles ou à la déchetterie des Lilas – qui centralise les vélos de toutes les déchetteries parisiennes.
En échange de ces conseils et de l’accès au matériel, une contribution de 15 euros minimum est demandée – le prix de l’adhésion – ainsi qu’un don de temps équivalent à trois heures de bénévolat. Il s’agit par exemple de participer à une séance de démontage d’épaves, d’accueillir des nouveaux usagers ou encore de participer aux ateliers de rue.
« Nous, on ne fait rien à votre place, c’est vous qui travaillez », explique Laure, une des membres actives de l’association, à un jeune garçon qui découvre le local. Le but est de rendre les adhérents le plus autonomes possible pour les convaincre de passer complètement au vélo, tant pour leur travail que pour leurs loisirs, et surtout ne pas abandonner après la première panne. « Nous leur apprenons à entretenir leur vélo pour qu’il dure le plus longtemps possible, souligne Arnaud, le coordinateur de Retour vert le futur et unique salarié. Notre objectif est de démocratiser la pratique. Pour nous, c’est un instrument d’émancipation. Il permet par exemple d’élargir son bassin d’emploi quand on cherche un travail. » Pour cette raison, le prix de vente correspond à seulement un tiers du prix d’achat. Voire moins quand il s’agit d’inciter enfants et adolescents à découvrir les plaisirs des deux-roues… sans moteur. •
Photo : Jean-Claude N’Diaye