De la belle idée de « jardin ouvert » pensé par Michel Corajoud, paysagiste et voulue par les habitants, il ne reste plus grand chose.
C’est tout à fait par hasard que les bénévoles du collectif P’tits déjs solidaires ont appris qu’une nouvelle grille allait être posée sur le muret qui longe l’esplanade du Maroc et la sépare des jardins, précisément là où tous les matins ils offrent aux réfugiés un petit déjeuner, un sourire et un moment de solidarité.
Un beau matin, lors d’une distribution, l’équipe découvre trois hommes occupés à mesurer le fameux muret. Interrogé par une des bénévoles, un employé municipal explique qu’une grille va être posée afin d’empêcher « les gens » de jeter des détritus dans le bassin en contrebas et pour prévenir les chutes (une personne serait tombée) !
Gilles Ménède, adjoint chargé des espaces verts, nous confirme que la pose de la grille a été effectivement décidée pour ces raisons et pour faire suite à des plaintes de riverains qui n’apprécient pas que des « personnes s’assoient sur le muret pour y manger ». Si la grille n’est pas encore posée, c’est apparemment, uniquement dû à un problème de fourniture.
Une réponse simpliste
On peut trouver suspect et déplorer que le collectif des petits déjeuners, présent quotidiennement à cet endroit et pourtant directement concerné, n’ait pas été informé au préalable ou mieux, consulté sur l’opportunité de cette nouvelle grille. Ils ont contacté la Mairie mais à ce jour attendent toujours une réponse.
Il faut surtout déplorer que la seule réponse de la Mairie soit la mise en place d’une nouvelle grille. Avant-première du « parquage » en bonne et due forme des usagers de drogue dans la partie nord du parc ou manque d’imagination de la part de nos élus pour trouver une réponse de fond plus adaptée ? Ou plutôt, tentative d’invisibiliser encore ceux qui s’assoient là, souvent des personnes exilées ?
Ce nouvel obstacle qui arrête le regard, contredit l’intention du concepteur du parc de « donner au public l’impression qu’il est dans un espace plus grand que réel ». Pour la petite histoire, ce parc de 4,2 ha, ouvert en 2007, est le fruit d’une mobilisation sans faille, certes soutenue par les élus, de citoyens et d’associations qui se sont battus pour qu’il existe1 et réponde à la diversité culturelle et sociale des habitants du quartier.
Mais après la première haute grille le long de la rue d’Aubervilliers et celles, intérieures, qui la compartimentent, l’esplanade du Maroc que les habitants et les associations voulaient accessible en permanence, se rabougrit et se referme de plus en plus.
Sous le titre : « Non, la cour du Maroc n’est pas une prison ! », le collectif des P’tits déjs solidaires, s’opposant « à ce nouveau projet de grillager encore plus cet espace originellement conçu pour être ouvert sur la vi(ll)e et permettre une mixité des usages pour tous » a lancé une pétition.
Photo : Thierry Nectoux