Journal d’informations locales

Le 18e du mois

juin 2021 / Jardins d’Eole : avis de tempête

Paroles de riverains

par Danielle Fournier, Sandra Mignot

Quand ils ont appris la décision préfectorale, les habitants du quartier se sont insurgés que l’on ajoute de la misère dans un quartier déjà en souffrance. Leurs réactions.

« C’est honteux, on ne peut pas y croire, on aimerait bien savoir qui a imaginé un scénario pareil », ont explosé Catherine et Jean-Pierre, deux habitants de longue date de la rue Riquet. Et Catherine d’ajouter que le signalement des nuisances, depuis plusieurs années ne change rien : « La police ne se déplace pas et on a l’impression que tout le monde s’en fout. »

« Ce qui arrive là, c’est la suite logique de tout un processus de paupérisation d’un quartier populaire auquel se sont ajoutés le problème des réfugiés, puis les conséquences socio-économiques de la pandémie », analyse Bernard, voisin du jardin. Il a envoyé pas moins de 400 mails en trois ans à l’adjoint chargé des espaces verts, Gilles Ménède. « Il me répond, remarque-t-il. Mais c’est surtout pour me dire qu’on n’y peut rien, m’informer de l’installation de nouveaux équipements récréatifs pour les enfants. Fin avril, il m’avait prévenu qu’une nouvelle réunion devait se tenir pour trouver une solution et voilà le résultat. »

Tentation de la violence

Certains riverains apprécieraient des solutions plus radicales. « Je suis pour que cesse le laxisme, je suis pour verbaliser, faire faire des travaux d’intérêt général, par exemple nettoyer le parc, les juger, s’indigne Catherine. Il y a des lois, mais elles ne sont pas appliquées. D’ailleurs l’alcool, les cigarettes sont vendus malgré les interdits et c’est une bande nombreuse qui se sent impunie et qui a pris possession de la rue. » Johanna voit déjà des familles quitter le quartier et s’inquiète de l’environnement dans lequel elle éduque ses enfants : « J’essaye de leur transmettre les bonnes valeurs, de leur faire comprendre que ces personnes sont en souffrance et certains de leurs droits pas respectés. Mais nous nous sommes quand même retrouvés face à une tentative de viol. Suis-je une bonne mère si je reste ici ? » Quant à Bernard, lui est inquiet et craint que certains habitants ne soient à leur tour tentés de réagir avec violence « Déjà certains s’interrogent et disent, pourquoi ne pas faire comme à Stalingrad [en référence aux tirs de mortiers, ndlr]. Nous sommes dans une société où seuls les débordements font réagir. »

Photo : Sandra Mignot

Dans le même numéro (juin 2021)

  • Le dossier du mois

    Jardins d’Éole : avis de tempête

    Danielle Fournier, Sandra Mignot, Sylvie Chatelin
    Le déplacement des usagers de drogues de Stalingrad aux jardins d'Eole par la préfecture, sans concertation ni même information des riverains et des associations, provoque déception, inquiétude et colère. « Rendez-nous notre parc, rendez-nous notre parc ! », scandent les habitants. Ce lieu vert et ouvert devait favoriser le vivre ensemble dans ce quartier multiculturel. Aujourd'hui, la réalité est bien différente. Si certains riverains n’hésiteraient pas à adopter des mesures radicales, d’autres, à l’instar des associations d’aide aux consommateurs de drogues et des élus, demandent que l’on aille au-delà.
  • Jardins d’Eole : avis de tempête

    Jardins d’éole : le rêve se referme

    Sylvie Chatelin
    De la belle idée de « jardin ouvert » pensé par Michel Corajoud, paysagiste et voulue par les habitants, il ne reste plus grand chose.
  • Jardins d’Eole : avis de tempête

    Vent de colère sur les Jardins d’ Eole

    Danielle Fournier, Sandra Mignot
    Le parc de la rue d’Aubervilliers est officiellement la nouvelle « scène ouverte » des usagers de drogue. Les riverains tentent de s’organiser contre une décision préfectorale qui dégrade leurs conditions de vie.
  • La Chapelle

    Ateliers Vélo

    Florianne Finet
    L’association « Retour vert le futur » organise régulièrement des ateliers gratuits de mécanique dans les quartiers populaires du 18e. Avec un objectif : démocratiser la pratique du vélo.
  • Montmartre

    Les dames pipi gagnent aux Prud’hommes

    Stéphane Bardinet
    Après plus de cinq ans de procédure judiciaire, six « dames pipi » parisiennes ont obtenu gain de cause contre la société néerlandaise 2theloo, gestionnaire de plusieurs toilettes de lieux touristiques parisiens.
  • Histoire

    Amiraux-Simplon : un quartier plein d’histoire

    Danielle Fournier
    Le 18e du mois a quitté la rue Marcadet pour s’installer au cœur du quartier Amiraux-Simplon-Poissonniers. Venez nous rencontrer et visiter ce quartier, à l’écart des parcours touristiques qui prennent d’assaut la colline du Sacré-Cœur pour voir Paris d’en haut.
  • Culture

    Ils font parler du 18e

    Sylvie Chatelin
    Le jury de la 5e édition du concours Filme ton quartier organisé par France 3 et présidé par Jean-Pascal Zadi, a classé Petite Sœur à Barbès 4e sur 350 films reçus. Une belle réussite pour ce (très) court métrage tourné par un duo enthousiaste et militant et qui lui assure une diffusion.
  • Culture

    Raoul Dufy, lumières sur la capitale

    Noémie Courcoux Pégorier
    Les œuvres rassemblées au musée de Montmartre proposent une narration nouvelle autour de la carrière du peintre, d’où émerge son lien particulier, intime, à Paris.
  • Les Gens

    Elle court, elle court, l’infirmière

    Noël Bouttier
    Rencontre avec Fatoumata Sankharé, athlète de haut niveau qui a commencé à courir à la trentaine, sans jamais lâcher son métier d’infirmière.

n° 331

novembre 2024