Avec la crise sanitaire, les Parisiens ont beaucoup plus mangé chez eux, et cela se traduit… dans les vitrines de nos quartiers. La moitié ouest de l’arrondissement a vu se multiplier les points de vente alimentaires, notamment de fruits et légumes, misant toujours plus sur l’argument de la qualité, voire de la vertu.
Epicerie de quartier, primeur « éthique », supermarché paysan… ces enseignes fleurissent dans les rues commerçantes, et plus particulièrement depuis 2020. Le 18e est depuis quelques années un champion en la matière : selon l’Atelier parisien d’urbanisme (APUR), il offre une densité de commerces alimentaires supérieure à celle de Paris (4,3 commerces pour 1 000 habitants contre 3,5 sur l’ensemble de la capitale). « Nous avons ouvert en octobre l’année dernière, le Covid avait boosté notre activité de vente en ligne créée en 2019. Alors on s’est installés sur deux marchés d’Ile-de-France et on a ouvert notre boutique du 18e », résume Raphaël Dutoit, un des quatre associés qui ont fondé Le Panier de Gaïa, qui ne vend que des fruits et légumes bio.
Dans cette boutique du haut de la rue Damrémont, même si « l’emplacement n’est pas forcément idéal », à 20 ou 30 mètres d’une enseigne spécialisée dans le bio et dans une rue où le trafic automobile est dense, le bouche à oreille est allé plutôt vite et la petite échoppe a convaincu une clientèle de quartier. Comme dans nombre de ces nouveaux commerces, une grande partie de l’approvisionnement est « direct producteurs ». L’absence d’intermédiaires permet de conserver des prix corrects, surtout pour les produits de saison. Et autorise une meilleure rémunération des fournisseurs.
Ici tout est de saison
Plus bas dans la même rue, Les Saisonniers ont installé leur « supermarché paysan ». L’enseigne possède déjà huit points de vente à Paris et Levallois et deux sont dans le 18e. Elle a été fondée par Thomas Lemoine agriculteur et Margaux Augizeau, auparavant directrice commerciale. Outre les fruits et légumes, exclusivement locaux (produits à moins de 45 minutes de Paris), issus de l’agriculture bio, en conversion vers le bio ou raisonnée, on y trouve aussi du pain, de la viande, du poisson, des œufs. Ces derniers produits devant être fournis par des exploitations qui s’engagent dans une charte du bien-être animal. « Chez nous, pas question de bêtes qui passent la nuit dans la bétaillère », résume Margaux Augizeau.
L’argument éthique importe aussi chez Miyam, enseigne d’abord lancée dans le 3e avant d’ouvrir son deuxième magasin rue du Poteau. Comme toutes ces enseignes récentes, l’aménagement est simple, caisses de bois et cagettes, étagères brutes et palettes. Ici, tout est de saison et direct producteur « cueilli 24 h avant » On peut aussi acheter des produits transformés, dont certains sont issus des cuisines de l’entreprise, qui recycle ainsi directement ses invendus où ses produits abîmés. « Nous sommes le premier supermarché à moins de 1 % de pertes alimentaires », vante l’enseigne, créée par une fratrie.
Côté fruits et légumes, 2020 a été une année record en France. Plus 8,6 % de végétaux consommés par rapport à l’année précédente soit 173,6 kg par ménage (selon une enquête du syndicat des professionnels des fruits et légumes, Interfel, et du centre technique de la profession CTIFL). On comprend alors pourquoi la concurrence inquiète peu tous ces nouveaux commerces. « Il y a beaucoup de demande, rassure Margaux Augizeau. Et nous sommes ravis de voir les initiatives se multiplier. Avant de saturer le marché parisien il y a du temps devant nous. » •
Photo : Thierry Nectoux