L’association Basiliade met en service des appartements en colocation dans le 18e. Le projet, monté avec l’aide de la Mairie de Paris, donne un toit à des jeunes migrants marginalisés dans leur pays d’origine et qui sont passés par une période de grande précarité sur notre territoire.
« En France, je suis moi-même alors qu’au Sénégal je jouais un rôle ; maintenant que j’ai un toit, j’aimerais terminer mes études et obtenir un master en marketing digital », explique l’un des résidents de l’appartement de la rue des Poissonniers. Les parcours des trois jeunes gens originaires du Sénégal, de Côte d’Ivoire et de Guinée*, qui partagent ce logement sont assez similaires et tristement banaux : homosexuels ostracisés dans leur pays et par leur famille, ils sont venus en France à la recherche de tolérance et de liberté. Migrants en attente de régularisation, ils sont passés par une période de grande précarité, dormant parfois dans la rue, dans un état de santé physique et psychique très dégradé. Et dans un hébergement collectif classique, tel que les institutions sociales les proposent, ils peuvent également être victimes de violences et de discriminations.
Basiliade est une association née dans le sillage des années sida et qui agit dans le domaine du médicosocial et du soutien aux personnes marginalisées et fragilisées. Dans l’arrondissement elle gère notamment un hôtel, transformé en foyer d’accueil pour des mères isolées en exil (lire notre n° 289). Le dispositif Escale, créé pour les personnes LGBT, a d’abord été lancé l’été 2020 avec un appartement dans le 20e. Celui de la rue des Poissonniers est le second du genre dans le 18e et le troisième à Paris.
Les appartements Escale accueillent en colocation trois personnes sur des périodes de six mois renouvelables. « Les objectifs de ces hébergements sont pluriels », explique Didier Arthaud, fondateur et président de Basiliade. « D’abord permettre à ces jeunes de se poser après une longue période d’errance, avant de pouvoir s’occuper de leurs droits et d’obtenir un permis de séjour, ensuite ils peuvent retrouver un bon état de santé physique et mentale, ce qui leur ouvre la voie vers l’insertion professionnelle. Seulement après ils pourront réfléchir et agir en vue de leur sortie du dispositif. » Escale permet en effet de proposer un accompagnement complet (médical, infirmier, juridique, psychologique et conseil pour l’orientation professionnelle et la formation), et d’apporter une aide alimentaire.
Le 13 septembre dernier, Ian Brossat, adjoint au logement et aux réfugiés à la Mairie de Paris et Eric Lejoindre, maire du 18e, sont venus découvrir ce troisième appartement mis à disposition par le bailleur municipal Elogie-SIEMP et ont fait connaissance avec les résidents. Ceux-ci ont raconté leur parcours, arrivés légalement pour des études ou clandestinement, ils répondent sobrement aux questions, et on sent encore le poids des épreuves qu’ils ont affrontées telles que le rejet, l’errance, la maladie ou la prostitution. Le mal du pays est présent : « Notre sexualité est bannie dans notre culture et jusque dans nos familles, mais pourtant, nous aimons toujours notre pays », confie Jacques. Mais tous regardent maintenant vers l’avenir. L’un aimerait se lancer dans la cuisine, un autre dans les nouvelles technologies et le troisième se verrait bien gardien de la paix. Ils peuvent garder espoir, sur les onze personnes déjà accueillies dans les appartements Escale, huit ont été régularisées.