Tout de noir vêtues, les corneilles ont du caractère et sont très bien adaptées à la vie parisienne grâce à leur intelligence et à leur opportunisme.
Les corneilles noires, Corvus corone en latin, et souvent improprement appelées corbeaux en français, sont de grands oiseaux de l’ordre des passereaux et de la famille des corvidés qui compte également à Paris la pie bavarde et le geai des chênes. Portant une livrée entièrement noire, y compris les pattes et le bec, la corneille est impressionnante, surtout lorsqu’elle lance son croassement caractéristique. Elle est pourtant capable de fantaisie en copiant vocalement toutes sortes de sons et un individu vivant au cimetière du Père Lachaise est connu pour imiter la sirène d’une ambulance !
Très habiles dans les airs, les corneilles animent souvent de leurs acrobaties aériennes les alentours du dôme du Sacré-Cœur de Montmartre, mais, irascibles, elles profitent aussi de leurs capacités en vol pour harceler tout rapace, goéland ou autre héron qui traverserait leur territoire. Pour son repas, l’oiseau n’est guère regardant et dévore indifféremment graines, insectes, fruits, oeufs, petits animaux et déchets. En hiver, il aime bouleverser les pelouses à la recherche de larves d’insectes, au grand dam des jardiniers ! A Paris, les corneilles ont bien profité du plan Vigipirate qui, en imposant des sacs plastiques transparents dans les poubelles, leur a offert un restaurant inépuisable à ciel ouvert !
Si leur population parisienne est stable et estimée, dans l’atlas des oiseux nicheurs de la LPO paru en 2019, à 450/550 couples, certains parcs concentrent de grands rassemblements qui rappellent le film « Les Oiseaux » d’Alfred Hitchcock.
Une étude du Muséum d’histoire naturelle, grâce à un programme de baguage aux Jardin des Plantes, des Tuileries et du Luxembourg, a démontré que ces bandes de corneilles étaient surtout composées de jeunes non encore en âge de se reproduire, des bandes d’ados, en quelque sorte ! Le fait d’avoir été nourris au nid avec des frites et des résidus de « malbouffe » entraîne chez eux une décoloration blanche sur les grandes plumes des ailes et de la queue, typique des individus fréquentant les sites très touristiques.
Sus aux sacs-poubelles
Pour tenter de diminuer cette trop grande affluence, la Ville a remplacé les poubelles des parcs par de grands conteneurs en bois et métal, inaccessibles aux oiseaux.
Très intelligente, la corneille ramasse les noix d’Amérique dans les parcs à l’automne et les brise en les laissant tomber sur le macadam depuis une grande hauteur. Elle sait également ramollir dans une flaque d’eau une tranche de pain dur ! Les marchés attirent aussi les oiseaux qui viennent faire le ménage à la fermeture, boulevard Ornano ou sous le métro à Barbès.
Ces jours-ci, les corneilles sont affairées à construire leurs nids qui accueilleront fin mars/début avril de trois à cinq œufs. Le plus souvent, la couvaison débute avant l’apparition des feuilles sur les arbres et l’on peut alors remarquer la queue de la femelle qui dépasse du nid, tandis que le mâle se charge d’éloigner les intrus, le plus souvent de paisibles pigeons. •
Photo : Jean-Claude N’Diaye