Journal d’informations locales

Le 18e du mois

octobre 2019 / La vie du 18e

Nature - De la vigne au vin, une liane voyageuse [Article complet]

Le vignoble francilien fut autrefois le plus important du royaume de France. Dans le 18e, il avait totalement disparu avant de renaître, notamment à Montmartre…

Fête des Vendanges oblige, parlons ce mois-ci de la vigne, Vitis vinifera, liane volubile qui semble avoir été domestiquée au Proche Orient, il y a plus de 5 000 ans, dans une vaste région englobant la Géorgie, l’Arménie et l’Iran actuels. La culture de ce végétal aurait été introduite en Gaule par les Grecs, avant de beaucoup se développer à l’époque romaine, les gallo-romains devenant vite des experts, inventant au passage le vieillissement en fûts de chêne alors qu’en Méditerranée le vin restait entreposé dans des poteries. Après une baisse de production à la chute de l’Empire, ce sont les moines qui ont relancé la culture de la vigne, source à la fois du « vin de messe » et de forts revenus liés à la vente des surplus. La France s’est alors couverte de raisins, le vignoble d’Ile-de-France devenant le plus important du royaume.

De la piquette au « Clos-Montmartre »

Bien sûr, l’abbaye aux Dames de Montmartre ou celle de Saint-Lazare possédaient des vignes sur et autour de la Butte, mais la réputation du vin de la Goutte d’Or, s’il a jamais existé, est largement usurpée !

Une légende circule sur le net affirmant qu’à la cour du roi Philippe Auguste, un vin de Chypre avait été sacré Pape des vins, celui de Malaga désigné Cardinal et celui de la Goutte d’Or couronné Roi ! Or, dans son poème « la bataille des vins » écrit vers 1224, Henri d’Andeli parle bien d’un fameux vin de Chypre, mais mentionne en seconde position un vin d’Aquila et non de Malaga. Quant à la Goutte d’Or, qui de toute façon n’existait pas encore, elle n’apparait bien sûr pas dans le texte, qui mentionne en revanche les vins de Pierrefitte, Meulan, Argenteuil, Marly et Montmorency.

Il a existé, seulement à la fin du XVIIIe siècle, une maison, « à l’enseigne de la Goutte d’Or », située près de la barrière des Poissonniers (actuel métro Barbès). Le quartier de la Goutte d’Or naîtra officiellement en 1860 lors de l’agrandissement de Paris, sans qu’on ait cultivé auparavant sur son territoire un vignoble notable.

Sur la Butte, après avoir alimenté après la Révolution des guinguettes comme celle du Moulin de la Galette, le vignoble a disparu au cours du XIXe siècle, au profit des immeubles, des rues et des jardins, avant que la vigne actuelle de la rue des Saules ne soit « reconstituée » en 1933 à l’initiative de la Commune libre de Montmartre, pour éviter l’urbanisation du « Square de la Liberté » créé par Francisque Poulbot à l’intention des enfants du quartier. Ce désormais célèbre « Clos-Montmartre » permet depuis 1934 d’élaborer, avec l’aide de généreux vignerons d’autres régions, une cuvée, entreposée dans le « caveau » situé sous la mairie, qui est ensuite vendue au profit des œuvres sociales de notre arrondissement. À noter également l’existence de vignes, dont nous avons parlé dans notre numéro 268, dans les jardins de l’hôpital gériatrique Bretonneau, cultivée depuis 2001. Voire, dans le square Jessaint.

Photo : Jean-Claude N’Diaye

Dans le même numéro (octobre 2019)

  • Le dossier du mois

    Logement : insalubrité à tous les étages

    Claire Rosemberg, Danielle Fournier
    Même si le nombre de logements insalubres décroît, la lutte contre l’habitat indigne semble sans fin. Le dernier constat établi par l’APUR montre que le 18e arrondissement détient le triste record du nombre de bâtiments actuellement surveillés.
  • Chronique

    Une gare est une gare

    Daniel Conrod
    Telle qu’elle est engagée, la transformation de la gare du Nord raconte l’effacement volontaire de la puissance publique au profit du marché.
  • Culture

    Barbès 100 % féminin

    Noël Bouttier
    Une artiste propose une exposition de photos en plein air représentant des lieux de Barbès, d’ordinaire très masculins, investis par des femmes.
  • La vie du 18e

    Petite ceinture : les projets se multiplient, les questions persistent

    Sophie Roux
    Malgré la décision d’ouvrir la Petite ceinture au public pendant deux mois, tous les samedis et dimanches, dans le 18e, des incertitudes pèsent sur ce projet phare de la mandature de la maire de Paris.
  • Montmartre

    Les Montmartrois pleurent leur bus [Article complet]

    Claire Rosemberg
    Le nouveau plan des bus mis en place en avril dernier mécontente les usagers du Montmartrobus.
  • Goutte d’Or

    Cuisine, culture et solidarité au Quartier libre

    Marie-Odile Fargier
    Le collectif 4C dispose enfin d’un local où les habitants sont invités à venir partager recettes culinaires et convivialité.
  • Histoire

    La Société Philanthropique, une vieille dame de l’action sociale

    Patrick Mallet
    Plus de deux cents ans après sa création, la Société, souvent méconnue du grand public, poursuit son action en particulier dans le 18e où l’on peut toujours croiser ses institutions : maison de la mère et de l’enfant, foyer Marjolin… Le premier épisode de cet article a été publié dans notre numéro 272 (juin 2019).
  • Les Gens

    Joëlle léandre, performeuse poétique

    Dominique Boutel
    Contrebassiste, vocaliste, compositrice, peintre à ses heures, elle arpente la planète flanquée de l’instrument qui l’a inspirée toute sa vie. (...)

n° 331

novembre 2024