Un temps de libération de la parole autour d’un podcast qui traite des questions de genre, de féminisme et d’égalité.
Le cadre rappelle un peu celui d’une émission de télé des années 80, Droit de réponse, le bazar et la provocation en moins. Nous sommes dans le hall du FGO Barbara, à côté du bar, dans une atmosphère favorisant l’expression, l’échange. Comme tous les premiers jeudis du mois, on vient y écouter collectivement un podcast d’Arte radio de la série Un espace à soi et en discuter.
La formule est d’abord née de la rencontre de deux personnalités. Julie Bataille, chargée des relations presse à FGO Barbara, a un goût personnel pour les podcasts. Après avoir proposé des soirées rap autour d’un autre podcast d’Arte radio, Le Mike et l’enclume, elle rencontre Charlotte Bienaimé, journaliste, au premier Podcast festival de la Gaîté lyrique. « J’avais de nombreux retours. Des auditrices manifestaient leur envie de partager leurs émotions, leurs ressentis, leurs trajectoires. Je n’avais jamais fait cela mais l’idée m’a plu ! » Elle se concrétise en octobre 2019. Chaque mois, jusqu’en juillet 2020, le FGO Barbara propose dans son hall une écoute collective du podcast mensuel.
Conçu par Charlotte Bienaimé en 2017, Un espace à soi est une série de podcasts qui traite des questions de genre, de féminisme et d’égalité. Elle est même devenue une référence sur ces questions, avec des sujets comme le sexisme chez les cadres, l’engagement, le sport, l’afro-féminisme, les amours lesbiennes, l’horloge biologique, la sexualité, le plaisir, etc.
Le podcast ? A l’origine condensé de (i)pod et (broad)cast(ing), c’est la tendance 2020 du web. Quelle drôle d’idée pour un objet conçu pour une écoute solitaire, sous un casque ! Pourtant la formule plaît et rassemble .
Ambiance intimiste
Ce jeudi de janvier, plusieurs séquences sont proposées à la réflexion et à la réaction. Charlotte Bienaimé anime la soirée. Elle diffuse le premier extrait, qui est d’emblée une plongée dans l’intime féminin, le rapport au corps, à la nourriture, à la norme, à l’autre. Son titre ? Le Gras est politique. Il y est fait référence à l’ouvrage de Gabrielle Deydier, On ne naît pas grosse, édité à quelques rues d’ici, aux Editions Goutte d’Or. La parole est à la salle – à 80 % féminine – pour aller plus loin, réfléchir à ce que ces paroles évoquent. « Moi, ça me fait penser à ma mère. A 68 ans, elle se pèse tout le temps ! » Une autre parle des représentations et des injonctions sociales qui « pèsent » sur le corps des femmes. Une troisième, des femmes qui cuisinent parfois « pour faire plaisir à leurs enfants ».
Il est ensuite question du sport. « On est conditionnées à être dans des sports de grâce, de contrôle. » « On a désappris aux femmes à utiliser leurs muscles et à frapper. » Les points de vue divergent aussi sur la performance, « qui n’est pas un but en soi pour les femmes ». « Moi, ça me plaît d’aller au bout de mes capacités ! » Les extraits se succèdent : le handicap, le corps abîmé, la sexualité. Les participant(e)s se prennent au jeu de l’écoute collective et osent exprimer leurs désaccords.
Les deux initiatrices ont envie que ces soirées soient encore plus ouvertes, et notamment sur le quartier. On sent que c’est tout un travail, chaque mois, pour améliorer encore la formule : revoir certains détails de l’organisation du hall, s’exposer en tant qu’animatrice pour faciliter l’échange et le partage, accueillir la parole de toutes et tous avec bienveillance, utiliser des techniques d’animation adaptées, s’ouvrir davantage aux habitant(e)s du quartier, laisser s’exprimer la diversité des opinions et des expériences... et on a envie de revenir !
Photo : Pascaline Lemoigne