Claire Patry, gériatre, évalue les adaptations mises en place par les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes afin de faire face à l’épidémie.
21 heures, la journée de Claire Patry, commencée à 8 heures ce matin, dans le cadre de « « l’équipe mobile de gériatrie externe Ehpad et ville » se termine. Sa mission consiste à épauler les médecins coordinateurs de quatre Ehpad du 18e arrondissement. Dans ces structures, la moyenne d’âge des résidents, souvent atteints de plusieurs pathologies, est de 85 à 86 ans.
« Le confinement, décidé très tôt (1), a retardé la diffusion du virus, explique la docteure Patry. Il a permis de s’organiser pour renforcer la prise en charge médicale en fonction de l’épidémie. Ainsi à L’Oasis, le médecin coordinateur est passé à temps plein. Et un généraliste vient en renfort. La création, en mars dernier d’une Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) dans le 18e a facilité l’implication des professionnels libéraux (lire notre numéro 281). »
Cette augmentation des moyens médicaux s’intègre dans la stratégie générale d’aide aux Ehpad mise en place par l’ARS d’Ile-de-France. La majeure partie ou un nombre important de résidents malades sont traités au sein de leur établissement. Ils y reçoivent les soins nécessaires par le biais de l’hospitalisation à domicile (HAD). Si leur état s’aggrave, les praticiens évaluent la capacité de leur organisme à supporter un traitement en réanimation très éprouvant.
Chaque situation est soigneusement examinée et personne n’est laissé sans assistance. Les résidents, très malades, ne pouvant être envoyés en réanimation, sont accompagnés jusqu’au terme de leur vie avec des soins d’accompagnement et des soins palliatifs.
Au niveau purement médical, les renforts sont donc là. C’est peut-être moins le cas pour les autres personnels soignants pourtant tout aussi indispensables à la prise en charge des résidents. A L’Oasis, une infirmière libérale a renforcé l’équipe mais les besoins demeurent importants. Heureusement, d’autres soutiens sont arrivés. « Nous avons sollicité l’IFSI de l’hôpital Bichat qui nous a envoyé 21 élèves de première année, indique la docteure Patry. Ils accompagnent les résidents dans des actes essentiels de leur vie : prendre leurs repas, marcher un peu et rester en contact avec leur famille via les outils numériques. »
En effet l’isolement est très dur à supporter et les établissements s’efforcent de trouver des moyens permettant aux résidents de conserver malgré tout un minimum de mobilité et de relations avec leurs proches. On accompagne ceux qui peuvent marcher et le souhaitent dans les couloirs ou la cour, s’il y en a une. Mais ils doivent accepter de porter un masque.
Malgré les précautions prises, la maladie se répand comme une trainée de poudre. Difficile dans ce contexte de chiffrer le nombre de personnes contaminées. Mais il y en a beaucoup dans les Ehpad. Chez les soignants aussi, le virus sévit. Entre un tiers et la moitié des effectifs ont été touchés, estime Claire Patry. Les personnes sans symptômes mais testées positives ont pris en charge les malades déclarés. Il faut prendre en compte la fiabilité relative du test réalisé à partir des prélèvements biologiques : il comporte un pourcentage d’erreur d’environ 30 %.
N’oublions pas que les Ehpad, gravement touchés par cette crise sanitaire, « méritent autant de soutien, logistique et humain, que l’hôpital », plaide Claire Patry.
[1]
[1] Entre le 11 mars et le 20 avril, les visites aux personnes âgées dans les Ehpad ont été interdites pour les protéger d’une infection au virus.